Le 19 octobre 2025, huit bijoux et joyaux de la Couronne de France ont été dérobés dans la galerie d’Apollon, au Musée du Louvre. Ces pièces, ornées de milliers de pierres précieuses, ont toutes appartenu à la famille royale française ou à des souverains impériaux. Un préjudice estimé à 88 millions d’euros ! Mais que recouvre exactement la notion de “joyaux de la Couronne” ? Quelle est l’histoire de ces bijoux volés au Louvre ? Voyage au cœur d’une collection mythique.
La grande histoire des bijoux royaux de France
Des joyaux inaliénables
Depuis toujours, les joyaux de la Couronne de France suscitent curiosité, fascination et même convoitise. C’est François Iᵉʳ, roi de France, qui décide en 1530 de constituer cette collection avec huit pièces serties dans des bagues. La plupart sont des parures appartenant à Anne de Bretagne, héritées de sa mère, Marguerite de Foix.
Trois semaines avant le mariage de François Iᵉʳ avec Éléonore d’Autriche, le 15 juin 1530, le premier inventaire de ce trésor est dressé à Bordeaux, accompagné de “lettres patentes”. Ces documents officiels précisent la composition de la collection, ainsi qu’une clause peu surprenante pour l’époque : les joyaux portés par les reines devront être remis au Trésor Royal à la mort de leur mari.
Une histoire chaotique
De ce premier fonds ne subsiste en réalité qu’une pièce, le rubis-spinelle “Côte-de-Bretagne”, en forme de dragon. Avec les difficultés financières dues aux guerres de religion, Henri III a choisi de mettre tout le reste en gage ! C’est Louis XIV qui va considérablement étoffer la collection, notamment avec les diamants offerts par le cardinal Mazarin.
Pendant la révolution, les joyaux sont mis à l’abri au “Garde-meuble de la Couronne”, avant d’être envoyés à Brest lors de la guerre de 1870 puis sur un navire de guerre, prêt à appareiller. En 1887, la IIIe République, embarrassée par cet héritage des monarques, décide de vendre la collection aux enchères. L’ensemble de couronnes, orbes (globe surmonté d’une croix), diadèmes, sceptres et bijoux est alors estimé à 21 267 040 francs. Certaines pièces seront cependant conservées par le musée du Louvre et installées dans la fameuse galerie d’Apollon.
Le retour des joyaux
Depuis 1985, le Louvre achète au fil de l’eau des pièces majeures, grâce à des campagnes d’acquisition, de don et de mécénat :
- En 1988, la couronne de l’impératrice Eugénie,
- En 1992, le diadème de perles de l’impératrice Eugénie,
- En 2002, le diadème de brillants et d’émeraudes de la duchesse d’Angoulême,
- En 2004, le collier et les pendants d’oreilles de Marie-Louise
- En 2008, le grand nœud de corsage d’Eugénie…
Bijoux volés au Louvre : quelques anecdotes
La parure saphirs de Marie-Amélie & Hortense
Parmi les joyaux volés le 19 octobre figurent un diadème, un collier et une boucle d’oreille provenant d’une parure en saphirs. Un ensemble de bijoux créé sous le premier empire et porté successivement par la reine Hortense, la reine Marie-Amélie et Isabelle d’Orléans.
Modifiée au fil du temps, elle est restée dans la descendance des Orléans jusqu’en 1985.
Tous ces bijoux sont ornés de saphirs de Ceylan dans leur état naturel, c’est-à-dire non chauffés, pour en changer la couleur. Les saphirs sont cernés de diamants mis en valeur dans des montures en or.
Certains experts pensent que cette parure aurait été offerte à la reine Hortense par l’impératrice Joséphine. D’autres qu’elle proviendrait de la reine Marie-Antoinette… La date de conception et l’auteur de ces joyaux demeurent inconnus en partie en raison des ajouts et des remaniements successifs. Il ne figure aucun poinçon des joailliers les plus illustres du XIXe siècle tels que Nitot, Bapst ou Marguerite, tous fournisseurs des souverains. Malgré toutes ces inconnues, la parure de la reine Marie-Amélie et de la reine Hortense est révélatrice du travail incroyable des joailliers parisiens du début du XIXe siècle.
La parure de Marie-Louise
Le collier et la paire de boucles d’oreilles en émeraudes de la parure de l’impératrice Marie-Louise font également partie du butin des cambrioleurs. Créée par le joaillier François-Regnault Nitot, cette parure a été commandée par Napoléon en avril 1810 pour son mariage avec Marie-Louise d’Autriche. Elle comprend un collier, un peigne, une boucle de ceinture et un diadème serti de 79 émeraudes colombiennes, pour un total d’environ 700 carats.
Lorsque Napoléon est déchu, en 1814. Marie-Louise repart en Autriche. À sa mort, ses bijoux sont partagés au sein de la famille Habsbourg. En 1953, la maison de joaillerie Van Cleef & Arpels acquiert le diadème et la boucle de ceinture de la parure et opte pour un choix radical : remplacer les émeraudes par des cabochons de turquoise. Les plus petites émeraudes sont vendues à partir de 300 $. La promesse, “émeraudes de la tiare historique de Napoléon”, fait son effet : selon la presse de l’époque, en 24 heures, la joaillerie est en rupture de stock.
Aujourd’hui, le diadème est exposé au National Museum of Natural History, à Washington. Quant au reste de la parure d’origine, il a rejoint le Louvre en 2004, avant d’être volé pour partie en octobre 2025. Il avait été acquis pour 3,7 millions d’euros… À l’époque, le prix le plus élevé jamais payé par un musée pour des bijoux individuels.
Bijoux volés au Louvre : la couronne d’Eugénie
La couronne de l’impératrice Eugénie ne fait pas exactement partie du butin. Elle a été retrouvée endommagée aux abords du musée, probablement tombée lors de la fuite des voleurs ! Mais cette couronne est, elle aussi, porteuse d’une histoire assez fabuleuse.
Bien que ni elle ni son mari n’aient eu de couronnement, l’impératrice Eugénie a eu la chance d’avoir sa propre couronne, spécialement créée pour l’Exposition universelle de 1855. Sertie d’émeraudes et de diamants et ornée de motifs de vigne, d’aigles et de chèvrefeuille, elle est composée de 1 354 diamants taille ancienne, 1 136 “roses” de diamants et 56 émeraudes.
Bien que la plupart des joyaux de la Couronne française aient été vendus par la troisième république, la couronne de l’impératrice Eugénie a été conservée. Elle est la seule d’une souveraine française existant encore. Lors du décès de l’ancienne impératrice, en 1920, la couronne a été léguée à la princesse Marie Clotilde Bonaparte. Elle a ensuite été mise aux enchères en 1988, puis donnée au Musée du Louvre.
Outre leur valeur patrimoniale, les bijoux volés au Louvre sont porteurs de la grande histoire de notre pays. Cette affaire souligne aussi la responsabilité des joailliers d’aujourd’hui : documenter, transmettre et créer des pièces capables, elles aussi, de traverser les siècles.
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